THIS STRANGE ENGINE - DELUXE EDITION

[Mr a]

Reçu

[Le Nobre]

Grand bonheur d'entendre enfin cet album tel qu'il aurait toujours du sonner, avec un Ian Mosley dignement mis en valeur, une section rythmique qui retrouve tout son punch et toute sa rondeur, sans rien perdre de sa finesse. One Fine Day accède pleinement à son statut de classique du groupe, Accidental Man gagne de l'aplomb de la substance, This Strange Engine reste This Strange Engine, mais les pleins et les déliés sont bien mieux mis en abîme.
Même la grotesque Hope For The Future (Que leur est-il passé par la tête avec ces arrangements ? Transformer de Lou Reed ça c'est sûr, mais tout de même, ces faux cuivres...) devient écoutable dans ces atours restaurés. Super boulot de Mike Hunter, vraiment. Je reste circonspect sur le choix d'avoir laissé Memory Of Water en version orchestre et de n'avoir pas convié le Big Beat Mix à la fête. Car je ne suis pas certain que la version qui apparaît au terme de cette Deluxe Edition ait subi le même lifting que l'album lui-même.
This Strange Engine prend en tout cas une autre dimension, et c'est tant mieux car cet album récréatif confirmait la mue courageuse entamée sur Afraid Of Sunlight, où Marillion osait se débarrasser de certains de ses vieux réflexes. Démarrer folk avec Man Of 1000 Faces, ne pas planter un énorme solo de guitare sur Estonia, virer totalement pop sur 80 Days, tout ça allait dans le bon sens. Le sens artistique, qui consiste à avancer plutôt qu'à stagner. Reste qu'évidemment à l'époque, tout n'était pas rose. Fin du contrat avec EMI, début de l'indépendance et d'un relatif manque de moyens, un Racket Club en gestation, un Stewart Every dévoué mais peut-être pas suffisamment expert, tout ça avait donné un résultat aux aigus criards et à la batterie bien chétive, gâchant le cachet sonore de l'ensemble.
Un mot aussi sur le live enregistré dans le Michigan, à Grand Rapids, sur la tournée financée par les fans américains je présume. Très bon concert, avec une set-list ma foi plutôt iconoclaste. White Russian dans le dernier rappel, c'est du jamais vu ! A ne pas manquer, un Rake's Progress du tonnerre de Brest, un fantastique This Strange Engine introduit par la masterclass de Pete sur son utilisation du delay et presque interrompu par une furie qu'H lui-même doit rappeler à l'ordre, et un King toujours décoiffant. Reste Slainte Mhath jouée à un tempo frisant le "je me débarrasse de la chanson", mais bon...
Une chouette réédition ce This Strange Engine.

[Seb]

Qui a le coffret et n’a plus de lecteur optique à la maison, ni CD ni BR pour en profiter ? Qui ? Devinez, c’est un boulet...
(je m’énerve des fois...)

[Seb]

Bon, le disque est dispo sur les plateformes de streaming. Je l’ai écouté comme ça. Un vrai plaisir. Gros boulot de Mike Hunter. Autant je ne l’épargne pas comme producteur, autant comme ingé son, il est vraiment au top.

"Le sens artistique, qui consiste à avancer plutôt qu'à stagner » : oui oui oui et mille fois oui Bruno (et c’est bien ce qui m’embête depuis Somewhere Else et que Mike Hunter est à la prod).

[Le Nobre]

Oui bon mais si comme tu le penses, ils ont cessé d'évoluer à partir de 2007, cela veut dire qu'ils auront été en mouvement pendant 24 ans, depuis 1983. Ce n'est déjà pas si mal !
Je reste convaincu que Meegan a été très surestimé. Ce n'est pas Nigel Godrich il ne faut pas exagérer ! Ecoute Marbles et après écoute le McCartney (Chaos And Creation In The Backyard) sorti un an plus tard, et tu verras ce que c'est qu'une prod organique, chaude, riche, le Marillion sonne tout petit petit à côté.
Moi je trouve au contraire que Mike Hunter leur a redonné de la vigueur. Et puis, oui, depuis disons Anoraknophobia ils ne se sont plus transformés dans des dimensions comparables au passage de AOS à TSE puis à Radiation. Mais leur spectre est vaste, alors stagner quand on a ce vocabulaire, ça peut encore donner l'impression qu'on progresse. Entre Somewhere et FEAR, moi je sens quand même une progression !

[Seb]

Oui mais où sont passées les chansons ? On n’a plus que des collages... Quand j’ai réécouté TSE, ça m’a frappé, on avait vraiment des chansons. Depuis Happiness, les vraies chansons géniales, du style de Power ou Real Tears For Sale, on n’en a pas beaucoup quand même...

[Le Nobre]

Oui là tu marques un point. On est en effet dans une écriture plus impressionniste, par touches successives. J'avais pensé à l'époque de FEAR d'ailleurs qu'ils étaient allés avec cet album au bout du système qui a fini de faire fuir Fish, le fameux "joining bits" !
En tout cas j'ai totalement réévalué TSE grâce à ce remix. Franchement à l'époque, ça ne sonnait pas du tout. Mosley est dans ce que j'appelais alors sa période "je joue avec des cure-dents", le son de la caisse claire était d'une minceur folle. Bref... Et oui tu as totalement raison, sur TSE ce sont des chansons, de vraies chansons.

À propos des "joining bits" je viens de lire le papier de Prog sur la tournée d'adieu, qui est complété par un focus sur la genèse de Vigil. Fish y redit ce qui est dans les sleeve notes de la deluxe édition, et sera probablement plus développé dans ses Mémoires (et n'avait jamais été rendu public jusqu'à cette année !). Son plan en 88 était de virer Arnison, ça on le sait depuis longtemps, mais aussi de profiter de ce départ pour également virer Mark et le remplacer par Mickey Simmonds. Il explique que Mark était alors empêtré dans les problèmes personnels et n'apportait plus ce qu'il avait apporté dans le passé. Et que l'arrivée de Mickey aurait boosté Steve Rothery, qu'il avait trouvé - je cite - "paresseux" sur Clutching.
On comprend mieux pourquoi ce sont Arnison et Kelly, et aucun autre membre du groupe, qui figuraient au bas de la colline sur la pochette de Mark Wilkinson.
Il revient également sur l'écriture de The Company, sous l'impulsion de Bob Ezrin, et de l'heure et demi passée chez lui à Gerrards Cross avec sur son piano un Mark Kelly incapable de traduire en notes ce qu'il avait en tête pour cette chanson. Chose dont s'acquittera Mickey les doigts dans le nez quelques jours plus tard.
On comprend mieux également pourquoi Mark charge aussi copieusement Fish dans sa biographie, en affirmant que sa voix était "détruite" dès 1987 !

La vie des groupes quand même...

PS : je suis tombé sur un concert du Steve Rothery Band, enregistré à Francfort en octobre de cette année. Il dédicaçait Forgotten Sons "à Derek, un vieux et très grand pote écossais qui fait en ce moment ses adieux au music business, ce qui est dommage car il est un grand parolier et un grand frontman". Ça fait bien plaisir d'entendre ça

[Seb]

Merci pour ce message passionnant Bruno !

[nikowe]

Merci pour les échanges et partages de ces infos et faits...
...amicalemente !

[Mr a]

Edition vinyle commandée dans mon espace culturel Leclerc....moins cher bien sûr que via Racket